Protection du réseau et valorisation de la profession

Quatrième et dernière communication en préparation de notre assemblée générale de grève du 20 septembre. Cette fois, nous examinons les menaces qui pèsent sur la profession enseignante et le réseau collégial. Le CPNC ne cache pas son désir de multiplier les modes et les voies de formation, notamment l’enseignement à distance (EAD) asynchrone et la reconnaissance des acquis et des compétences (RAC). Au-delà des questions légitimes que soulèvent ces pratiques, nous pouvons nous interroger sur leurs impacts sur notre profession et nos conditions de travail.

Un dépôt patronal qui laisse craindre le pire

On voit dans le dépôt patronal un désir de voir évoluer l’enseignement dans la direction d’une plus grande adaptabilité, que ce soit à la réalité des étudiantes et des étudiants ou aux besoins du marché du travail. En souhaitant multiplier les voies et les modes de formation, en encourageant par exemple le développement de l’EAD asynchrone et de la RAC, le CPNC risque de provoquer un morcellement de la tâche enseignante, sans parler d’une érosion de notre autonomie. On parle ici d’un réel bouleversement en profondeur de l’enseignement et de ses finalités. Par exemple, les différents gestes qui forment actuellement notre tâche pourraient être dissociés les uns des autres et confiés à des personnes différentes. Ainsi, on pourrait dorénavant proposer différents emplois plus spécialisés dans le domaine de l’enseignement. Les uns deviendront des « spécialistes de contenu », développant du matériel pédagogique, les autres deviendront de simples tuteurs, accompagnant les étudiantes et les étudiants tout au long de formations dispensées en ligne, alors que d’autres encore — ô cauchemar ! ô souffrance ! — se consacreront essentiellement à la correction de copies, lorsque ce travail ne sera pas simplement confié à de bêtes machines. Cela implique aussi une dévalorisation de notre profession, d’une manière qui n’est pas sans rappeler le travail à la chaîne : chaque individu perd de vue le processus éducatif, ne contribuant qu’un geste au processus global. Et quand bien même le morcellement ne donnerait pas lieu à une spécialisation telle que décrite dans les lignes précédentes, nous pourrions tout de même
craindre l’universalisation de la précarité, alors que la charge serait morcelée en un vaste marché de tâches à la pièce, sortes de micro-emplois, à partir desquelles les personnes devraient tenter de se constituer un gagne-pain.

Ce sombre scénario s’inscrit parfaitement dans une logique de marchandisation et d’uniformisation de l’éducation. Dans un bulletin Expresso publié en avril, nous faisions le portrait de la Commission d’évaluation de l’enseignement collégial (CÉEC) et décrivions le processus d’assurance-qualité. Nous avons insisté sur les menaces que font peser sur l’autonomie professionnelle cette tendance à substituer aux contrôles internes aux collèges des mécanismes de contrôle externe. Le développement de l’EAD, de la RAC et le morcellement de la tâche, combinés à une place croissante occupée par les organismes de régulation et les entreprises privées concourent à un risque de déclassement et de dépossession des professeures et des professeurs.

Des positions aux antipodes malgré quelques échanges francs

Le CPNC souhaite explicitement développer l’EAD asynchrone, ce qui ouvre la porte aux pires dérives, parmi celles que nous avons évoquées dans la section précédente. La partie patronale saisit notamment l’occasion offerte par la création du taux pour la rémunération des autres activités pour aller dans le sens d’une « déconstruction » de la tâche. Pensons ainsi à la demande à l’effet d’explorer « les possibilités concernant la rémunération pour les activités autres que la prestation de cours dans le cadre de la FAD [le CPNC utilise l’expression « formation à distance » plutôt qu’EAD] asynchrone ». Le CPNC demande aussi ouvertement à ce que le matériel développé dans le cadre de la RAC asynchrone demeure la propriété intellectuelle des collèges et non celle des professeures et des professeurs.

La création du taux pour les autres tâches s’inscrit également en toute cohérence avec les projets de développement de la RAC. Dans les négociations actuelles, la partie patronale se montre peu encline à reprendre les discussions qui concernent cette question, notamment l’interprétation et la portée des clauses qui concernent les « autres activités ». Ils prétendent que ces clauses sont trop récentes pour être déjà remaniées et qu’il faut les laisser vivre pendant un certain temps. Ils seraient prêts pour les négociations actuelles à simplement laisser tomber l’ensemble des demandes qui, de part et d’autre, portent sur cette question. Le CPNC invoque également le besoin de maintenir la « fluidité » de la RAC.

Ajoutons que plusieurs des raisons invoquées par le CPNC pour le développement de l’EAD sont déplorables. Ils ne s’en cachent même pas : recourir à l’EAD représente pour eux un moyen de contourner les problèmes de disponibilité des locaux. Ainsi, plutôt que de nous doter  des espaces dont nous avons besoin pour mener nos missions d’enseignement, ils préfèrent nous engager dans une voie dont nous ne sommes pas encore certains de bien saisir toutes les implications.

Pour notre part, nous jugeons essentiel de convenir avec le CPNC de balises nationales afin d’encadrer l’EAD et la RAC. On ne saurait laisser au ministère, à la Fédération des cégeps et aux directions locales la liberté de développer des projets de manière anarchique, alors que cela soulève de nombreuses questions en termes de conditions de travail et de rémunération, sans parler de la compétition que cela peut accentuer entre les collèges. Si la FNEEQ ne possède pas a priori une position d’opposition radicale à toutes les formes d’EAD, elle ne souhaite pas valoriser et promouvoir cette modalité d’enseignement, et encore moins l’EAD asynchrone, à laquelle nous opposons une fin de non-recevoir plus ferme. La même logique s’applique avec la RAC.

Face au CPNC,
luttons pour défendre

la profession enseignante
et le réseau collégial!

Maintenant, c’est le temps de voter! AG 20 septembre, 12 h 30


Un mot de notre vice-président à la négociation

Un mot de notre VP négo, Sébastien Adam
Cliquez ici pour visionner une vidéo de notre vice-président à la négociation, Sébastien Adam.