Austérité et compressions

Depuis l’été dernier, les mauvaises nouvelles se succèdent sur le plan de financement de l’enseignement supérieur. Rappelons certaines annonces : 

  • À l’été 2024, annonce de restrictions sur les budgets d’investissement, touchant autant les travaux de construction, de rénovation et d’entretien, que le MAOB (acronyme qui désigne les dépenses en « mobilier, appareillage, outils et mobilier »). Non seulement les budgets disponibles étaient réduits, mais les établissements se voyaient imposer un plafond annuel de dépense, nonobstant les sommes disponibles dans les soldes de fonds. 
  • À l’automne 2024, annonce d’un gel de recrutement pour les postes qui n’impliquent pas de contacts directs avec les étudiant·es et d’une mesure de plafonnement des heures rémunérées. Cela faisait craindre pour le maintien de nombreux services essentiels au fonctionnement des établissements et à la poursuite de nos activités pédagogiques, notamment le soutien informatique, la sécurité et l’entretien. Le plafonnement des heures rémunérées reposait sur des mesures biaisées, qui imposaient des contraintes déraisonnables aux collèges. Ainsi, les plafonds ont été établis en prenant 2023-2024 comme année de référence, alors que nous avons fait 8,5 jours de grève à l’automne 2023. Les plafonds d’heures rémunérées sont donc artificiellement bas. De plus, le Conseil du trésor impose différentes règles d’application un peu byzantines, qui obligent par exemple les cégeps à compter dans leurs heures rémunérées autant les heures des personnes en arrêt maladie que les heures des personnes qui les remplacent. Vous comprenez aisément les contraintes supplémentaires que cela entraîne.   
  •  Le budget provincial déposé à la fin mars soulevait déjà l’inquiétude : on annonçait en effet une progression des dépenses de 2,1% pour le ministère de l’Enseignement supérieur, ce qui est inférieur à la progression des coûts de système. Nous savions donc déjà que des compressions allaient être nécessaires.  

Les plus récentes annonces s’ajoutent donc à une situation déjà passablement glauque. Le Cégep a confirmé aujourd’hui une information qui nous avait été transmise officieusement : pour Rosemont, l’effort demandé s’élève à 3,3M$. Ces coupures auront inévitablement un impact sur l’enseignement et sur les services aux étudiant·es.  

Par ailleurs, la situation des profs est un peu particulière. Le régime financier des cégeps et la convention collective verrouillent la majeure partie du financement des ressources enseignantes. Les efforts de compression exigés par le Conseil du trésor et le ministère de l’Enseignement supérieur ne peuvent conduire à une réduction de cette partie des ETC enseignants. Cela ne signifie cependant pas qu’il n’y aura pas d’impacts, directs comme indirects. Si la majeure partie des ETC est protégée par la convention collective, il existe bien d’autres sources de financement qui permettent de générer de la tâche enseignante. Ces sommes pourraient disparaître ou être réduites. Parmi les exemples, mentionnons la suspension du financement pour la recherche à partir du PART ou les possibles coupures des ressources dans les annexes de financement non-conventionnées, comme celles qui soutiennent les mesures du PARES. Autre objet de préoccupation, le Cégep nous a annoncé ne pas souhaiter investir l’entièreté des ressources de la « colonne D » (voir la clause 8-5.06 de la convention collective) dans le projet de répartition de 2025-2026, pour aider à atténuer la pression sur le plafond d’heures rémunérées. Si le nombre d’ETC de la colonne D est limité (2,54 ETC/année) et que ces ressources peuvent être reportées d’une année à l’autre, vous comprenez que cela soulève tout de même des préoccupations en matière d’emploi. Des projets devront-ils être mis sur la glace ? Nous sera-t-il demandé de faire plus avec moins ? 

Mentionnons aussi un autre impact pervers de la manière dont le gouvernement applique les mesures de contrôle budgétaire. Nous assistons à une hausse de la population étudiante dans le réseau collégial. En vertu du régime de financement des cégeps, plus particulièrement les dispositions qui portent sur le financement des ressources enseignantes, le nombre d’ETC générés pour l’enseignement augmente. Cela n’a cependant pas d’impact sur le plafond d’heures rémunérées que les établissements doivent respecter. Donc, la proportion des heures consacrées aux enseignant·es augmente, entraînant un besoin équivalent de compression dans les heures des autres catégories de personnel. Outre la solidarité avec nos camarades, nous décrions le fait que cela mette en péril les services aux étudiant·es, alors même que leur nombre croît.