Dans notre dernier texte, nous avons évoqué la question de la rémunération et de la protection du pouvoir d’achat. Bien que cet enjeu soit fondamental, rappelons que le Front commun s’est donné comme objectif d’obtenir des investissements significatifs pour améliorer non seulement les conditions salariales, mais aussi les conditions de travail. Tout en poursuivant notre examen de certaines problématiques qui relèvent de la table centrale, faisons alors un rappel des grands enjeux de la table sectorielle, en insistant tout particulièrement sur la question de la charge de travail et de son alourdissement.
Pour le Conseil du trésor, le réseau collégial n’est pas sur le radar
Le moins que l’on puisse est que le gouvernement ne semble pas accorder une grande importance au réseau collégial et aux problèmes auquel il est confronté. Nous sommes absents des priorités gouvernementales et la discrétion semble s’être imposée comme critère d’embauche pour occuper le poste de ministre de l’Enseignement supérieur.
Rappelons aussi que, lorsque le Conseil du trésor a fait une mise à jour de son dépôt initial, en mars 2023, il a omis d’y inscrire le nom des deux fédérations qui représentent les professeures et les professeurs des collèges (FNEEQ-CSN et FEC-CSQ). De surcroît, la seule mention du réseau de l’enseignement supérieur survenait en toute fin de document, alors que le gouvernement nous annonçait son intention de mettre « en place de[s] leviers afin de faciliter l’accès et l’offre de service, notamment, concernant la formation à distance ainsi que la promotion de la recherche ». On voit ici un reflet des priorités du gouvernement, mais pas l’ombre d’une préoccupation pour les problèmes soulevés par les travailleuses et les travailleurs.
Rappelons aussi le caractère insultant des grandes orientations gouvernementales, qui trouvent écho dans les propositions déposées aux tables sectorielles. Le Conseil du trésor déplore les difficultés d’attraction et de rétention de la main-d’œuvre, mais il ne trouve alors pas mieux à faire que d’adopter une logique de détention et de contrainte envers les travailleuses et les travailleurs. Ainsi, plutôt que de s’attaquer aux problèmes en améliorant les conditions de travail et les conditions salariales, il tente de nous en faire porter la responsabilité en nous reprochant notre recours aux congés et aux prestations d’invalidité. Ce sont pourtant les conditions difficiles sur le terrain qui expliquent l’épuisement professionnel et l’utilisation des congés pour retrouver un équilibre perdu entre le travail, la famille et la vie personnelle. Tant que le gouvernement ne s’attaquera pas à cet enjeu, les problèmes d’attraction et de rétention demeureront.
Le CPNC rate complètement la cible
Nous avons aussi eu l’occasion de discuter à plus d’une reprise des offres sectorielles du CPNC, formellement rejetées lors d’une précédente assemblée générale. Non seulement leur dépôt ne tient-il pas compte de nos préoccupations, mais il contient des éléments inacceptables. Nous en aborderons quelques-uns ici et poursuivrons notre exposé dans le quatrième et dernier texte de préparation à l’assemblée générale de grève.
Par exemple, alors que nous savons que la mise à jour des compétences et des connaissances exige du temps et contribue à la surcharge de travail, le CPNC ne nous propose qu’un appui extrêmement limité. En effet, si la partie patronale souhaite rendre obligatoire le perfectionnement en l’inscrivant aux tâches prévues au volet 1, elle n’offre de ressources que pour le perfectionnement numérique, dans un contexte où elle souhaite largement développer l’enseignement à distance (EAD). Cela ne répond pas aux besoins. Les professeures et les professeurs sont responsables et autonomes. Nous reconnaissons évidemment que notre profession exige un développement continu en cours de carrière. Mais il ne revient pas à l’administration des collèges de nous dire dans quelles sphères. Nous avons besoin de temps, pas de nous faire dire quoi faire.
Vous avez été nombreuses et nombreux à faire part de vos préoccupations en matière de conciliation travail – famille – vie personnelle. Nous avons déjà dénoncé dans ce texte les orientations patronales en matière d’attraction et rétention. Mais le CPNC innove dans l’odieux en nous proposant d’investir des ressources pour inciter le personnel des collèges à travailler les soirs et les fins de semaine. Cette menace, qui plane aussi sur le personnel de soutien et le personnel professionnel, est tout à fait contraire à nos intérêts.
Finalement, c’est ce que ne mentionne pas le dépôt patronal qui est peut-être le plus évocateur. N’y cherchez pas quoi que ce soit sur les impacts de la multiplication des étudiantes et étudiants à situation de handicap (EESH) ou à faible moyenne générale du secondaire (MGS), les enjeux qui concernent de manière spécifique les différents programmes techniques (présence de cours théoriques, de cours pratiques, de laboratoires et de stages), les nombreuses préparations, le nombre élevé d’étudiantes ou d’étudiants, l’absence de prise en compte du facteur NES pour les cours de pondération inférieure à 2, les exigences de perfectionnement dans les disciplines à évolution technologique rapide ou le poids que font peser les opérations d’élaboration d’implantation ou de révision de programmes. Toutes nos préoccupations sur la tâche enseignante, tout particulièrement ce qui concerne le volet 1, sont ignorées.
À la table de négociation, la partie patronale ne donne aucun signe qu’elle s’intéresse aux préoccupations exprimées par l’ASPPC. Elle prétexte l’absence de mandats et de ressources pour refuser de s’engager à quoi que ce soit. En soi, cette attitude justifie à elle seule le besoin d’adopter de moyens de pression plus musclés.
Nous connaissons les problèmes
du réseau collégial.
Nous proposons des solutions.
Il est temps que le CPNC nous écoute!
Rappel des grands enjeux de la table sectorielle pour l’ASPPC
Nous avons amorcé les négociations en reprenant la liste de problématiques élaborée en 2019. Cette liste avait l’ambition de recenser l’ensemble des problèmes vécus dans le réseau collégial, du point de vue des professeures et des professeurs. Au printemps 2022, nous avons eu l’occasion de la réviser et de la compléter. Comme vous pouvez le deviner, ou vous en rappeler, la liste est longue. Nous connaissons la réalité de l’enseignement dans les cégeps et nous sommes en mesure d’en témoigner, contrairement à la Fédération des cégeps et même, malheureusement, à bien des directions locales.
La liste de problématiques a ensuite permis d’élaborer un cahier initial de demandes, que nous avons adopté à l’automne 2022, avant procéder à un exercice de priorisation à la fin du mois d’août 2023. Lors de la prochaine instance de l’ASPPC, nous discuterons du retour de consultation des syndicats. Rappelons que nous avons adoptée telle quelle la proposition de priorisation des demandes. Nos revendications sont regroupées en six grands thèmes, qui sont énumérés dans l’encadré suivant.
Dans ce texte, nous avons choisi de nous concentrer sur l’enjeu de la tâche et de la surcharge de travail. D’autres enjeux seront abordés dans le prochain texte, comme nous l’avons mentionné plus tôt.
Évidemment, cela ne minimise pas l’importance des autres thèmes et des demandes qui demeurent prioritaires. C’est le cas, notamment, des revendications qui concernent la précarité. Le CPNC ne nous offre rien en cette matière. En fait, la partie patronale nous propose même des reculs. Notons par exemple la demande de calculer le nombre de postes sur le total de ressources de la plus petite session plutôt que sur la moyenne annuelle ou le désir de limiter l’ouverture de postes dans les disciplines associées à des programmes fermés. N’oublions pas également que nos revendications sur la tâche et le financement sont susceptibles de profiter aux professeures et aux professeurs précaires. Ainsi, alléger la tâche des uns pourra en créer pour les autres.
Nous poursuivons aussi la lutte pour de meilleures conditions salariales et de meilleures conditions de travail à la formation continue, alors que le CPNC considère pour sa part que les dernières négociations ont réglé l’ensemble des problèmes.
Dans le prochain texte : menaces qui planent sur la tâche enseignante et le réseau collégial !
Un mot de notre vice-président à la négociation !
